Écoute !
Prière d’illumination
Seigneur,
tu as dis ta Parole à nos ancêtres, tu l’as dis à travers les temps, des cultures, des langues multiples et des circonstances divers. Permets nous de recevoir ici et maintenant une Parole qui nous parle, qui nous touche et qui nous laisse un message. Amen
Lectures bibliques
Dtn 6, 1- 9 Voici les commandements, les décrets et les règles que le Seigneur votre Dieu m’a ordonné de vous enseigner, pour que vous les mettiez en pratique dans le pays dont vous allez bientôt vous emparer. 2Tu apprendras ainsi, tout au long de ton existence, à reconnaître l’autorité du Seigneur ton Dieu et à obéir aux décrets et aux commandements que je t’ai donnés, pour toi et pour tes descendants, afin que tu jouisses d’une longue vie. 3Tiens-en compte, Israël, et veille à les mettre en pratique. Tu y trouveras le bonheur et tu deviendras un peuple nombreux dans ce pays qui ruisselle de lait et de miel, comme l’a promis le Seigneur, Dieu de tes pères.
4 Écoute, Israël : Le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur. 5Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être et de toute ta force. 6Les paroles que je te donne aujourd’hui demeureront sur ton cœur. 7Tu les répèteras à tes enfants ; tu en parleras quand tu seras assis chez toi ou quand tu seras en route, quand tu te coucheras ou quand tu te lèveras. 8Tu les attacheras sur ton bras et sur ton front, 9tu les écriras sur les montants de porte de ta maison et sur les portes de tes villes.
Marc 12, 28 – 34 Un spécialiste des Écritures les avait entendus discuter. Il vit que Jésus avait bien répondu aux sadducéens ; il s’approcha de lui et lui demanda : « Quel est le premier de tous les commandements ? » 29 Jésus lui répondit : «Voici le premier : “Écoute, Israël ! Le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur. 30Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être, de toute ta pensée et de toute ta force.” 31Et voici le second : “Tu aimeras ton prochain comme toi-même.” Il n’y a pas d’autre commandement plus important que ces deux-là. » 32Le spécialiste des Écritures reprit : « Très bien, maître ! Ce que tu as dit est vrai : Dieu est unique, et il n’y en a pas d’autre que lui. 33L’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence et de toute sa force et aimer son prochain comme soi-même est plus important que toutes les offrandes et les sacrifices d’animaux. » 34Jésus vit qu’il avait répondu avec intelligence et lui dit : « Tu n’es pas loin du règne de Dieu. » Et personne n’osait plus lui poser de questions.
Prédication
I
Pour une fois qu’on interroge Jésus, qu’on le met à l’épreuve et que cela se passe bien ! A la fin tout le monde est d’accord. Miracle.
Pas de doute, il n’y pas plus important dans la foi que ceci :
De se souvenir encore et encore que nous avons un seul Dieu !
Et que tout se résume dans le fait d’être aimé et dans la suite savoir aimer.
Le scribe est satisfait de cette réponse de la part de Jésus et Jésus se réjouit que le scribe soit d’accord avec lui que le fait de se savoir aimé et d’aimer est encore plus important que tous les rites, que toutes sortes de sacrifices.
Pour une fois, tout va bien. Une conviction dans la foi qui fait l’unanimité.
II
“Écoute, Israël ! Le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur. 30 Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être, de toute ta pensée et de toute ta force.”
C’est le début d’une prière qui est composée de quelques versets du livre de Deutéronome, que nous avons entendu tout à l’heure, et qui continue en rappellant certains gestes de prière et surtout la volonté de transmettre, de génération en génération, ces bases de la foi.
Dans la tradition juive, le croyant est censé dire cette prière deux fois par jour.
C’est la première prière qu’on dit à un nouveau-né, c’est la dernière prière qu’on prie en accompagnant un mourant.
Cela encadre et rythme la vie.
On l’accroche dans les Mezouza (un petit boîtier qu’on fixe à la porte) devant la porte d’entrée de la maison et les hommes les fixent par une banderole sur le front au moment de prier.
Cette prière, ce credo, encadre et rythme la vie des croyants pour ne jamais ’oublier ce qui nous porte et ce qui nous tient en vie : Ce Dieu, créateur, qui a voulu de nous, qui nous a offert la vie et qui nous accompagne sur nos chemins et tous les moments de notre vie.
Et c’est ainsi que ces phrases étaient aussi sur les lèvres de celles et ceux qui subissaient des persécutions, en montant dans les trains de déportation, en entrant dans les chambres à gaz, et probablement aussi le 7 octobre 2023 quand les familles cherchaient à se cacher devant les terroristes dans le kibboutz de Be’eri.
Chemâ Israël Adonaï élohéinou, Adonaï èhad. … en hebreu.
Le premier mot, chema! Écoute en français, donne son nom à cette prière : « le chema ».
III
Mais pourquoi est-ce tellement important ? D’oùvient le succès de ces lignes ?
Peut-être parce qu’en découvrant tout le mal qu’on peut rencontrer dans la vie, ’il faut se le dire et redire encore :
Seul le Seigneur peut avoir un impact sur nous. Quoique fassent les être humains, le mal qu’on inflige les uns aux autres, quoi que décident les seigneurs du monde, il y a un seul seigneur sur lequel il faut compter et en qui mettre sa confiance,
Adonaï, le seigneur dont le nom ne veut rien dire d’autre que d’Etre et permettre d’Etre,
être source de vie et permettre la vie.
C’est sur lui que nous devons compter et mener notre vie, nos actions et discernement à la suite.
Et comment cela se réalise-t-il ?
En écoutant, en aimant les paroles de Dieu et en les mettant en pratique.
IV
Nous disons parfois que juifs et chrétiens, même les musulmans, ont en commun d’’être des religions du livre. Cela peut prêter à confusion. Cela peut donner l’idée que nous serions des communautés de lecteurs et de lectrices. Et bien que ce soit vrai, que se ’soit important dans nos religions, la lecture et l’étude de nos textes, l’accent est mis ici sur tout autre chose :
La loi la plus importante qui peut exister, Jésus et le scribe nous le rappellent : nous vivons par l’écoute. Nous sommes, à la suite du premier testament, une religion de l’écoute. La parole est d’abord une parole annoncée et dite.
Rappelons-nous que la première parole était celle qui créait le monde. Elle n’était écrite nulle part, mais Dieu disait que la lumière soit et la lumière fut. Cette parole avait la force de mettre en place tout un monde, toutes les créatures.
Parce que Dieu dit et les choses se passent.
Être à l’écoute de la Parole de Dieu, c’est alors aussi sentir comment il agit en nous et envers nous, et c’est certainement aussi, dans la suite, de vouloir participer à l’accomplissement, à ce que la Parole se réalise.
Quand il nous dit qu’il nous aime, ce n’est pas une parole à méditer sur un plan intellectuel, mais avant tout à entendre et à recevoir comme une réalisation en nous, la ressentir plus que tenter de l’analyser.
Je vous rappelle la lecture d’il y a 15 jours, où Jésus terminait une lecture du prophète Esaïe, à la synagogueen disant : « aujourd’hui ces paroles sont accomplies pour vous qui avez des oreilles pour entendre. »
La foi n’est pas une gymnastique intellectuelle en soi , mais si nous méditions et travaillons ces textes encore aujourd’hui, c’est pour être à l’écoute de ce que les textes anciens nous inspirent pour nous aujourd’hui.
Comment est-ce que cela résonne en vous ?
Se dire que nous sommes des croyants de l’écoute.
Une écoute active,
Qui cherche à comprendre,
Qui cherche à réaliser,
Qui cherche à vivre en conséquence.
Nos ancêtres dans la foi, étaient beaucoup plus habitués à l’écoute, puisque tout le monde ne savait pas écrire ou lire.
Il fallait tendre l’oreille pour comprendre ce qui se passe.
V
Aujourd’hui, j’ai l’impression que l’écoute n’est pas toujours évidente pour nous.
Nous ne nous heurtons pas au problème de l’écriture, mais à un autre problème :
Nous sommes, il me semble, de la génération de l’image.
Moi la première, je ne lis plus de notice, de mode d’emploi, non, je regarde un tutoriel en vidéo.
La presse écrite perd des’abonnés,
Les youtubeurs comptent de nombreux followers.
Dans les couloirs du métro, dans nos rues, uniquement quelques slogans et surtout des images.
Nous sommes entourés d’images que nous avons appris à décrypter.
Quelqu’un a mis sur internet une planche avec des logos de marques et une planche avec des feuilles d’arbres. Il voulait tester : qui connaît encore les arbres qui vont avec les feuilles et qui connaît les logos de marques ? Vous vous doutez bien du résultat. Les logos ont remporté. Parce que le marketing a compris que, pour vendre un produit, il faut l’associer à une image vite reconnaissable. Et notre cerveau est entraîné là-dessus.
Le problème de l’image ?
Parfois elle nous capte et nous fige dans une première impression.
C’est l’apparence.
C’est la première impression.
C’est ce qu’on veut nous faire voir plutôt que ce que l’on découvre.
Or il serait très important d’être à l’écoute.
L’autre jour j’étais dans une réunion et j’entendais une dame, d’environ 70 ans, dire : « ah ah , les jeunes d’aujourd’hui ils sont manipulés par les réseaux sociaux. Ils ne comprennent rien. Ils n’ont plus de sens politique. Ils ne s’engagent pas … » Et patati , et patata … vous connaissez la chanson.
Le conférencier essayait de la contredire et de faire comprendre, avec une certaine politesse, que c’était des stéréotypes non justifiés mais malheureusement la dame n’avait pas d’oreilles pour entendre.
Et surtout, je suppose qu’elle n’avait pas de jeunes autour d’elle pour se faire une autre image. Elle aurait l’occasion de prêter l’oreille à un jeune, je suis sûre qu’elle ne parlerait pas de la même façon.
Pour s’entendre, il faut se rencontrer, prendre le temps de s’écouter, se parler, essayer de comprendre ce que l’autre vit et pense.
Et ne pas rester sur une image, que d’autres nous présentent, vite fait.
Comme le fait ce scribe : Il vient voir et discuter avec Jésus. Certainement, il avait entendu dire que Jésus était un hérétique. L’image qu’on présentait de lui dans l’opinion publique n’était pas bien favorable.
Mais le scribe, lui, a pris le temps d’être à l’écoute.
Il a voulu se faire sa propre image et, à la fin, il constate que Jésus est bien un bon juif, quelqu’un qui sait ce qui compte dans la foi, et qui ne trahit en rien les fondamentaux.
Scribe et Jésus, après s’être écoutés réciproquement, sont d’accord sur ce qui compte et peuvent dire ensemble que les sacrifices et les rites sont moins importants que de garder sa foi en Dieu qui nous aime et qui souhaite qu’on s’aime.
Soumis à l’écoute de la même promesse fondamentale : Écoute, nous avons un seul Dieu et il nous aime et nous encourage à aimer !
Ils s’entendent. Ils se reconnaissent enfants du même Dieu. Frères humains. Collaborateurs dans la même action.
VI
Je retiens de nos lectures d’aujourd’hui que nous avons à apprendre à être à l’écoute, toujours de nouveau.
Être à l’écoute de Dieu,
Être à l’écoute les uns des autres.
Pour que la force de la parole de Dieu agisse en nous et à travers nous et fasse qu’on s’entendent.
Et pour que le monde autour de nous découvre qu’aimer et être aimé est possible.
Amen
Christina WEINHOLD, 03 11 2024