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Prédication Marc 7 : pure et impure
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Culte du 1er septembre 2024 , prédication de Christina Weinhold
Lectures bibliques
Jacques 1, 22-27
22Mettez la parole de Dieu en pratique : ne vous contentez pas de l’écouter, en vous
faisant des illusions sur vous-mêmes. 23Car toute personne qui écoute la parole, sans la
mettre en pratique, ressemble à quelqu’un qui se regarde dans un miroir et qui se voit tel
qu’il est. 24Après s’être regardé, il s’éloigne et il oublie aussitôt comment il est. 25En
revanche, la personne qui se penche attentivement sur la Loi parfaite, celle qui rend libre,
y reste attachée, elle la met en pratique, sans se contenter de l’écouter pour l’oublier
ensuite ; eh bien, cette personne sera heureuse dans tout ce qu’elle fait !
26Si quelqu’un croit être religieux mais ne sait pas maîtriser sa langue, il se trompe lui-
même : sa religion ne mène à rien ! 27Voici ce que Dieu, le Père, considère comme la
religion pure et authentique : secourir les orphelins et les veuves dans leur détresse, et se
garder de toute tache due à l’influence de ce monde.
Marc 7, 1-23
1Les pharisiens et quelques spécialistes des Écritures venus de Jérusalem s’assemblent
autour de Jésus. 2Ils voient quelques-uns de ses disciples prendre leur repas avec des
mains impures, c’est-à-dire non lavées selon la coutume. 3En effet, les pharisiens,
comme tous les Juifs, sont attachés à la tradition des anciens : ils ne mangent pas sans
s’être lavé les mains avec soin 4et au retour du marché, ils ne mangent pas avant de
s’être aspergés d’eau. Ils respectent beaucoup d’autres pratiques : lavage des coupes,
des pots, et des plats de bronze [et des lits].
5Les pharisiens et les spécialistes des Écritures demandent donc à Jésus : « Pourquoi tes
disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens, et prennent-ils leur repas avec des
mains impures ? » 6Jésus leur répondit : « Vous êtes des hypocrites ! Ésaïe avait bien
raison lorsqu’il déclarait de la part de Dieu, à votre sujet, ce qui est écrit :
“Ce peuple m’honore en paroles,
mais leur cœur est loin de moi.
7C’est en vain que ces gens me rendent un culte ;
les doctrines qu’ils enseignent
ne sont que des prescriptions humaines.”
8Vous laissez de côté les commandements de Dieu, dit Jésus, pour suivre la tradition
humaine. »
9Il leur disait encore : « Vous êtes habiles pour rejeter le commandement de Dieu afin
d’établir votre propre tradition ! 10Moïse a dit en effet : “Tu respecteras ton père et ta
mère”, et aussi “Celui qui maudit son père ou sa mère, qu’il soit mis à mort.” 11Mais
vous, vous dites à quelqu’un : “Tu as le droit de déclarer à ton père ou à ta mère : Ce que
j’aurais pu te donner pour t’aider est Corban”, ce qui veut dire une “offrande réservée à
Dieu”. 12Et donc vous autorisez cette personne à ne plus rien faire pour son père ou sa
mère ! 13De cette façon, vous annulez la parole de Dieu par la tradition que vous
transmettez. Et vous faites beaucoup d’autres choses du même genre. »
14Jésus appela de nouveau la foule et il leur disait : « Écoutez-moi, vous tous, et
comprenez bien : 15Il n’y a rien de ce qui est extérieur à une personne qui puisse la
rendre impure en entrant en elle. Mais ce qui sort d’une personne, voilà ce qui la rend
impure. » [16]
17Quand Jésus fut entré dans la maison, loin de la foule, ses disciples l’interrogeaient sur
cette parabole. 18Et il leur dit : « Êtes-vous donc, vous aussi, sans intelligence ? Ne
comprenez-vous pas ? Aucune chose de l’extérieur ne peut rendre une personne impure
quand elle entre en elle. 19Car ces choses n’entrent pas dans son cœur, mais dans son2
ventre, pour être ensuite éliminées. » Par ces paroles, Jésus déclarait que tous les
aliments sont purs. 20Il ajouta : « C’est ce qui sort d’une personne qui la rend
impure. 21Car c’est du dedans, du cœur de l’être humain, que viennent les mauvaises
pensées ; elles le poussent à vivre dans la débauche, voler, tuer, 22commettre l’adultère,
vouloir ce qui est aux autres, agir méchamment, tromper, commettre des actes honteux,
être envieux, dire des insultes, être orgueilleux et insensé. 23Tout ce mal sort du dedans
et rend la personne impure. »
Prédication 1er septembre 2024
« Quelle bande de malpropres ! C’est dégoûtant ! Les disciples ne se lavent pas les mains avant de manger ! »
A première vue, dans cette altercation transmise dans l’évangile de Marc,
il s’agit d’un problème d’hygiène : « ils passent à table sans se laver les mains ».
Mais nous comprenons vite qu’il s’agit de plus.
Car ce que critiquent les pharisiens et les scribes c’est que les disciples ne suivent pas les rituels spirituels : « Ils passent à table sans les lavements rituels. »
Le problème c’est que c’est difficile à distinguer pour un étranger qui regarde de l’extérieur. Laver les mains c’est laver les mains, non ?
Faut croire que non, même si les deux se ressemblent.
Quand on entre dans une synagogue, encore aujourd’hui, on trouve des sanitaires ordinaires, mais aussi des ustensiles liturgiques pour se laver les mains d’après un rite bien défini.
C’est plus évident encore dans les mosquées, où avant toute prière, les croyants font des lavages bien ritualisés.
Dans les églises catholiques il reste une toute petite trace de ces traditions, qui sont les bénitiers à l’entrée des églises. Mais c’est réduit à quelques gouttes d’eau et d’ailleurs le sens qu’on y donne aujourd’hui est de se souvenir de son baptême. On entre dans l’église comme baptisé.
Car dans les temps anciens, personne ne rentrait dans les églises sans être baptisé. Quand on visite une église très ancienne, on peut encore voir que logiquement le baptistère se trouvait près de l’entrée et non devant proche de l’autel.
L’idée de base reste la même dans nos religions :
On ne s’approche pas de Dieu, ou d’un lieu saint, sans s’y être préparé et cela veut dire :
Alors on pourrait dire que nous les protestants nous sommes aussi une telle bande de malpropres, car nous entrons dans nos temples sans passer par une purification.
Nous arrivons ici tel que nous sommes.
Je veux croire que la plupart d’entre nous ont pris leur douche ce matin ou alors ont fait un autre petit effort pour arriver de façon propre, sans effrayer le voisin dans le banc du temple par une forte odeur.
Mais à part cela nous arrivons avec ce qui nous préoccupe,
Avec nos défauts, nos échecs, nos manquements …
Dans la confiance que nous n’avons pas à les déposer à l’entrée avant d’entrer,
Mais dans l’optique de les poser ici … lors de cette célébration, dans les mains de Dieu.
La purification, la purification spirituelle, elle nous tient toujours au cœur, mais dans notre rite c’est devenu un acte complètement dématérialisé. Il n’y a pas de geste, pas d’action à faire, tout se dit, tout se passe par les paroles, et par l’écoute … par exemple au moment de la prière dite de repentance et de l’annonce de la grâce qui suit.
C’est déposer ce qui nous encombre et ce qui pèse sur nous, dans la prière, à travers des paroles. … sans geste.
Du coup, sommes-nous toujours conscients de ce que nous faisons ?
Le geste aide tout même parfois à souligner, à nous faire comprendre ce que nous faisons, ce que nous pensons.
On peut dire tout simplement à quelqu’un « je t’aime » et le penser vraiment du fond du cœur,
Mais souvent nous souhaitons le souligner par un geste, une action, en offrant des fleurs, en s’embrassant, en préparant une petite attention personnalisée.
Et voici que nous touchons à un autre aspect évoqué dans les textes proposés pour aujourd’hui :
Quel lien entre croire et faire ? Entre conviction et action ? Entre foi et pratique religieuse ?
Je veux retenir uniquement deux aspects dont je pense que cela nous concerne toujours :
A) Nos actes doivent être en cohérence avec la foi, mais pas dicter, déterminer ou alors résumer notre croyance.
Dans l’exemple concret : Se laver les mains, s’asperger, d’après un rite, peut souligner l’acte de vouloir se rendre pur devant Dieu ou se sentir purifié par Dieu. Cela peut faire sens. Mais ce n’est pas le fait de le faire en soi qui nous purifie. C’était une des convictions exprimée par les réformateurs : prêter trop d’attention aux gestes, sans se soucier de leur message, risque de vider ce geste de son sens et de lui attribuer une puissance magique.
A l’époque cela tournait surtout autour de la question de la Sainte Cène. Ce qu’on reprochait au rite c’est que les gens y participaient en pensant qu’en buvant et en mangeant cela leur apportait le salut, sans vraiment comprendre ce qui se passait. Le rite qui ne se comprend plus mais qui se fait par habitude et en espérant y trouver un bénéfice, devient une superstition. C’est pour cela qu’on avait insisté pour que les paroles qui accompagnaient la Saint Cène soient dites à haute voix et compréhensibles, c’est-à dire traduites dans les langues maternelles des croyants. Le fait de rompre le pain accompagne et illustre une parole, mais le pain, l’hostie, n’a pas plus de sainteté une fois hors de son contexte, hors de la parole.
Le problème du Protestantisme, c’est qu’on a tellement voulu nous libérer de ces rites qui prêtent à confusion, qui prennent le dessus sur la Parole, des rites qui s’autonomisent sans qu’on y voie l’idée initiale … qu’on a oublié que l’être humain a besoin de gestes et du faire.
Nous ne vivons pas par la Parole seule. Nous avons cinq sens et parfois il est aussi important de faire : allumer une bougie, laver les mains, s’asperger, partager un bout de pain avec mon voisin etc.
A nous, les protestants, de retrouver un bon équilibre entre écoute et action, parole et geste. … sans pour autant tomber dans le piège des rites creux.
Et une autre question intéressante est évoquée dans nos textes :
B) Le Mal vient-il de l’extérieur ou de l’intérieur ?
Peut-on enlever par quoi que ce soit ce qui nous fait du mal ?
Le Jésus de Marc et dans la suite la lettre de Jacques, rappellent que le mal réside en nous. Nous avons beau nous laver et nous montrer propres devant les autres .. celà n’empêche pas que nous portons avec nous des taches bien sombres.
« Le mal que je ne veux pas faire, je le fais toute même … » s’exclame Paul avec tristesse (Romains 7).
Et ceci malgré tant d’efforts.
Alors comment mettre en adéquation notre conviction et nos actions ?
Tout d’abord en acceptant que nos gestes ne nous sauveront jamais et que le mal ce n’est pas forcément de l’extérieur que cela vient mais de nous-mêmes.
Dans son commentaire de l’évangile de Marc et concernant notre passage, le théologien français Elian Cuvillier écrit en 2002 :
« L’anthropologie du Jésus de Marc
Il est dans l’air du temps, en ce début de troisième millénaire, de postuler que les problèmes de l’homme sont causés par des événements extérieurs: C’est toujours du dehors que vient le mal. C’est toujours l’autre qui m’agresse, qui est impur, qui est mauvais, raciste ou moralement dépravé. II faut retrouver soit la communion avec les gens qui partagent les mêmes convictions (à l’intérieur du groupe), soit la paix et l’harmonie intérieures qui seules permettront une juste relation avec le monde, avec les autres et avec Dieu. Le Jésus de Marc ne partage pas cette douce illusion.
L’intérieur de l’homme est la proie du mal. Paul aurait dit : Juifs et Grecs sont sous l’empire du péché (Rm 3,9).
C’est de l’extérieur de l’homme, c’est-à-dire de la parole d’autorité de Jésus, que peut venir une libération. »
Je résume : Il faut renverser notre regard. Le mal ne vient pas de l’extérieur, le salut si.
Le fait de prêter moins d’attention aux gestes extérieurs, renforce la démarche intérieure et nous interroge toujours de nouveau : que puis-je changer pour faire moins de mal autour de moi ? Quand je veux combattre le Mal, que puis-je faire de mon côté ?
C’est dans cette optique que nous devons tenter toujours à nouveau de mettre en adéquation nos actions avec nos convictions,
Sans jamais penser que nos gestes nous sauveront ou nous purifierons.
Le geste devient donc une action libre et volontaire,
Une conséquence de que ce que j’ai compris,
Une action à laquelle je suis poussée par une action qui me précède :
Celle du Christ qui m’attend et qui se penche vers moi pour me laver les pieds, les mains, mon cœur …
Qu’il nous vienne de lui la force et l’envie de partager autour de nous des gestes qui font du bien autour de nous et à nous-mêmes.
Amen