- Accueil
- Actualités
- prédications
- Vie spirituelle
- Le baptême : narration et témoignage
Le baptême : narration et témoignage
Partage
Prédication du 16 juin 2024
Lectures bibliques
Actes 8 , 26Un ange du Seigneur dit à Philippe : « Lève-toi et pars en direction du sud, sur la route qui descend de Jérusalem à Gaza. Cette route est déserte. » 27Philippe partit aussitôt. Sur son chemin, il rencontra un eunuque éthiopien, un haut fonctionnaire chargé d’administrer les trésors de Candace, la reine d’Éthiopie ; il était venu à Jérusalem pour se prosterner devant Dieu 28et il retournait chez lui. Assis sur son char, il lisait le livre du prophète Ésaïe. 29L’Esprit saint dit à Philippe : « Va rejoindre ce char. » 30Philippe s’en approcha en courant et entendit l’Éthiopien qui lisait le livre du prophète Ésaïe. Il lui demanda : « Comprends-tu ce que tu lis ? » 31L’homme répondit : « Comment pourrais-je comprendre, si personne ne me guide ? » Et il invita Philippe à monter sur le char pour s’asseoir à côté de lui. 32Le passage de l’Écriture qu’il lisait était celui-ci :
« Il a été comme un mouton qu’on mène à l’abattoir,
comme un agneau qui reste muet devant celui qui le tond.
Il n’a pas ouvert la bouche.
33Il a été humilié et son droit a été bafoué.
Qui parlera de ses descendants ?
Car on a mis fin à sa vie sur la terre. »
34Le fonctionnaire demanda à Philippe : « Je t’en prie, dis-moi de qui le prophète parle-t-il ainsi ? Est-ce de lui-même ou de quelqu’un d’autre ? » 35Philippe prit la parole et, en commençant par ce passage de l’Écriture, il lui annonça la bonne nouvelle de Jésus. 36Ils continuèrent leur chemin et arrivèrent à un endroit où il y avait de l’eau. Le fonctionnaire dit alors : « Voici de l’eau ; qu’est-ce qui empêche que je sois baptisé ? » [37] 38Il fit arrêter le char. Philippe descendit avec lui dans l’eau et il le baptisa. 39Quand ils furent sortis de l’eau, l’Esprit du Seigneur enleva Philippe. Le fonctionnaire ne le vit plus, mais il continua son chemin tout joyeux. 40Philippe se retrouva à Azot, puis il passa de ville en ville, en annonçant partout la bonne nouvelle, jusqu’à ce qu’il arrive à Césarée.
Prédication
Voici un des rares récits de baptême dans la bible et qui peut nous donner des indices sur le sens du baptême dans le temps biblique. Mais un baptême, c’est aussi et toujours une affaire personnelle et j’ai donc décidé, au lieu de faire un discours sur le sens du baptême, de lui donner la parole, à cet homme d’Ethiopie. Qu’il nous dise comment, lui, il a vécu cette situation, et quel sens avait pour lui le baptême :
L’Ethiopien raconte :
« Vous savez, ma vie a été pendant longtemps une vie marquée par le succès. J’étais devenu quelqu’un d’important. Des portes se sont ouvertes pour moi, là où je ne l’avais pas attendu. Mes parents pouvaient être fiers de moi. J’étais devenu contre toute attente le responsable des trésors de la reine. Alors vous comprenez ? Pas uniquement que le grand portail de la cour s’est ouvert pour moi, pas également que j’assistais aux banquets ou aux fêtes de la cour comme si c’était mon salon, mais même, là où la reine venait toute seule et uniquement elle, de temps en temps chercher ses bijoux ou vérifier ses biens, c’est moi qui portais la clé sur moi. Cette porte du trésor m’obéissait et s’ouvrait quand je le voulais et uniquement sur ma commande. Mais bien sûr mon premier rôle était de garder la porte bien, bien fermée.
Tout cela avait un prix.
J’ai dû accepter d’être émasculé.
Et oui, ce n’est pas que pour les gardiens d’harem, vous savez ?!
Dans leur tête, dans la tête des responsables à la cour, c’était comme si tout désir s’éloignait de nous : Le désir de la femme, mais aussi de l’argent, du pouvoir. Une chose est sûre. Faire la révolte au palais pour créer une propre dynastie n’étais pas possible pour moi.
Bon, en bref, pour moi c’était donc un prix à payer, un choix à faire : Si je voulais grimper dans mes responsabilités, si je voulais accepter cette offre, je devais alors mettre … vous savez quoi … sur la table.
Si vous voulez savoir comment cela se passe en pratique, je vous renvoie à votre imagination et oui, c’est dégueulasse, une vraie boucherie. J’avais la trouille. Et j’avais raison. Du sang partout, des douleurs inimaginables, encore des jours et des semaines après l’événement. Heureusement, on ne m’avait pas dit avant combien d’hommes perdaient leurs vies dans des telles opérations.
Mais un homme ne crie pas, n’est-ce pas ? J’ai fermé ma bouche et j’ai hurlé en silence et en solitude.
Mais une fois rétablie, la vie facile commençait : Tout le monde me faisait confiance d’office, comme si j’étais un loup transformé en petit caniche, dont on n’a plus rien à craindre. La vie à la cour, des jolis vêtements, même avec quelques fantaisies qu’on n’aurait pas acceptées
d’un vrai homme, un très, très bon salaire pour satisfaire tous les besoins qui me restaient.
Au moins dans un premier temps, tout était bien. Comme je disais : Une vie de succès.
Avec le temps, par contre, j’ai senti un vide.
Pas uniquement le vide quand je poussais la nuit la porte vers mes chambres, où personne ne m’attendait. Pas le même habitat, comme chez mes frères et sœurs où leurs enfants, qui naissaient les uns après les autres, mettaient bien du désordre mais aussi de la vie sous leur toit.
Non, il y avait aussi cet autre vide qui prenait place en moi : à quoi bon ma vie ? quand l’eau dans lequel je me rafraîchissais me reflétait, qui voyais je ? ce que voient les autres ? Un homme ? Un eunuque ? un homme à peau noir ? un Ethiopien ? un riche ? un fonctionnaire ? Qui suis-je ? quel est mon identité dans tout cela ? Qui ici, autour de moi, me prend vraiment au sérieux ? qui suis-je, moi, au fond de moi ?
Et j’ai fait ce qu’on fait dans ces situations : j’ai commencé à m’intéresser à la religion. J’ai un peu regardé avec un peu plus d’intérêt ce qui existait. Mais là où j’étais le plus attiré c’était par les juifs. On avait une communauté assez importante chez nous et ce qui attirait c’était leur sérieux. Car sur le marché des religions, je peux vous dire, on trouve de tout, mais vraiment du tout. Des gens qui vous font boire des breuvages, des ingrédients douteux. Parfois cela réussit, pour passer quelques heures joyeuses et légères, mais la plupart du temps cela vous rend malade. Puis des gens qui consultent des os ou des organes de poules pour vous prédire votre avenir. Comme par hasard, ils vous promettent ce que vous voulez entendre et en plus, tout cela coute bien cher.
Non, les juifs, c’est sérieux et cultivé. Ils lisent beaucoup, ils discutent. Ils respectent les autres. Ils ont plein de règles pour permettre de bien vivre ensemble. Je me suis approché et j’ai pris goût.
Et plus, je passais de temps dans la communauté, plus j’entendais parler de Jérusalem : la ville de Dieu ! Le centre de la foi ! le lieu à ne pas rater.
Et donc un jour, j’ai pris tout mon courage et j’ai demandé à ma reine un congé.
Chose qui n’existait pas, mais ma reine est gentille, et elle avait vu qu’elle pouvait toujours compter sur moi et alors elle m’a accordé cette faveur et j’ai fait ce long voyage jusqu’à Jérusalem.
Et là encore des portes se sont ouvertes pour moi. J’ai dormi dans les meilleures auberges, j’ai dégusté de nouveaux plats, j’ai acheté des souvenirs, et j’ai même pu acheter un rouleau des saintes écritures, le rouleau du prophète Esaïe. Même pour moi c’était bien cher. Mais j’avais envie de l’étudier.
Mais j’ai dû remarquer qu’il y avait aussi des portes fermées. Au temple, je suivais les hommes qui allaient vers la prière … quand un gardien m’arrête « Tu n’es pas d’ici … » dit il. « bien vu, bien vu « j’ai répondu. Il se moque de moi ou quoi ?
et il continue; « Tu ne serais pas coupé , toi ? » j’ai rougis mais cela ne se voit pas trop, heureusement. « Oui, alors ? Tu parles au haut fonctionnaire de la reine d’Ethiopie, mon ami. » « Enchanté, mais vous ne pouvez pas entrer, continue cet homme : Comme c’est écrit dans le livre du Deutéronome : tu n’entreras pas ici, c’est réservé aux hommes d’Israël. Mais pas de soucis, tu peux prier dans la cour des païens, derrière la cour des femmes, si vraiment tu veux prier. »
Et là, d’un coup, il y avait de nouveau ce vide, ce désert au fond de moi. Qui suis-je ? Suis-je ce que cet homme me dit être ? comment il me classe et me range avec ceux que j’ai le droit d’être et ceux que non ? Suis-je cela ? Un cas ? Une chose ?
Alors voilà que j’ai quitté Jérusalem avec tous mes achats pour retourner chez moi. Au moins là-bas on me respecte.
Et dans mon char, en train de lire, qu’est-ce que je lis ? ?
Es 56, 3 Qu’il n’aille pas dire, le fils de l’étranger
qui s’est attaché au SEIGNEUR, qu’il n’aille pas dire :
« Le SEIGNEUR va certainement me séparer de son peuple ! »
et que l’eunuque n’aille pas dire :
« Voici que je suis un arbre sec ! »
(…) 6Les fils de l’étranger qui s’attachent au SEIGNEUR
pour assurer ses offices, pour aimer le nom du SEIGNEUR,
pour être à lui comme serviteurs,
tous ceux qui gardent le sabbat sans le déshonorer
et qui se tiennent dans mon alliance,
7je les ferai venir à ma sainte montagne,
je les ferai jubiler dans la Maison où l’on me prie ;
leurs holocaustes et leurs sacrifices
seront en faveur sur mon autel,
car ma Maison sera appelée :
« Maison de prière pour tous les peuples ».
Oh quel bonheur !
Quelle promesse par la bouche du prophète !
Est-ce que le gardien qui savait citer le Deutéronome connaissait aussi ce passage ?
Plus j’avance dans le texte, plus j’ai l’impression que c’est écrit pour moi et que quelqu’un me parle.
Et je n’aurais pas remarqué cet homme qui suit en courant mon char. Mais il me crie et me demande : « Comprends-tu ce que tu es en train de lire ? »
Oui, non, si .. comment dire ? je comprends très bien ce qui est écrit là ! Un grand merci à mon enseignant à la synagogue, il a fait du bon travail pour m’apprendre l’hébreu. Je comprends aussi que c’est une grande vision qui est évoquée ici par le prophète : pas de limites, pas de portes fermées, un grand rassemblement pour venir adorer le même Dieu. Mais comment le comprendre ? C’est un futur? c’est déjà ? C’est irréaliste ?
Et moi, moi dans tout cela ? Comment cela se fait-il que j’aie choisi ce rouleau ? J’aurais pu acheter pour le même prix trois petits prophètes, ou deux livres du Pentateuque. Mais j’ai opté pour ce rouleau. Et je lis : « Il a été comme une brebis qu’on mène à l’abattoir, comme un agneau qui reste muet devant celui qui le tond. Il n’a pas dit un mot.
33Il a été humilié et n’a pas obtenu justice. Qui pourra parler de ses descendants ? Car on a mis fin à sa vie sur terre. »
J’ai eu très chaud et ce n’était pas à cause du soleil sur cette route vers le sud.
Ces paroles touchent et font vibrer les cicatrises que je porte sur mon corps, mais plus encore que je porte en mon âme. Ce prix que j’ai payé à l’époque, ce n’est qu’avec le temps que j’en ai compris toute la dimension. Je n’ai pas ouvert la bouche pour en parler, mais c’est comme s’il y avait quelqu’un qui me comprenait.
Alors j’ai répondu à cet homme qui collait au char :
« Comment pourrais-je comprendre, si personne ne m’éclaire ? »
Oups, c’est moi qui dis ça ? Moi le haut fonctionnaire de la reine, je montre ma fragilité ?
Et puisque j’y suis, je vais encore plus loin. La vision d’Esaïe m’inspirait. Si alors c’est dans les idées de Dieu qu’un jour tous soient ensemble, pourquoi ne pas commencer tout de suite à s’entrainer un peu ? Et moi, le responsable du trésor de la reine, avec ma clé toujours sur moi, j’ai laissé entrer dans mon char cet homme que je n’avais jamais vu auparavant. Je ne lui demande pas qui il est, lui-même ne veut rien savoir sur moi. Mais nous voilà tous deux côte à côte, nos têtes penchées sur l’écriture et de temps en temps la tête levée, yeux dans les yeux. Mon vis-à-vis me parle d’un Jésus de Nazareth. Me dit que lui, il pensait que ce temps dont parle le prophète était arrivé. Me parle aussi de tout ce que l’homme avait dû endurer et comment s’est terminée sa vie.
Un prix bien plus élevé que celui que j’avais payé, moi. Et tout cela, parce qu’il faisait confiance que Dieu voulait vraiment qu’il n’y ait plus de barrière entre les hommes et que tous viendront à lui. Je pleurais quand j’apprenais sa mort, mais mon ami me faisait sourire de nouveau quand j’apprenais aussi que Dieu savait rouler la pierre devant la tombe et le faire lever d’entre les morts.
Et je me réjouissais, quand j’entendais que Jésus promettait d’être avec nous jusqu’à la fin du monde et cela voulait dire aussi partout dans le monde.
Ce jour-là, j’ai interrompu pour un moment mes interrogations et ma recherche et j’ai demandé le baptême à mon compagnon de route.
Car j’avais bien compris une chose dans le discours de mon compagnon de route :
Rien n’empêche d’être en lien avec ce Dieu dont prêchait Jésus.
Ni nos fautes. Ni nos défauts.
Personne n’est complet ou parfait.
Mais tous sont entièrement aimés.
Et quand j’étais dans l’eau et que la surface reflétait mon visage, je me voyais autrement : comme un enfant bien aimé et accepté. Dans ce reflet à la surface de l’eau, se mélangeait le visage du Christ. Le ressuscité avec ses blessures et malgré tout vivant et confiant, me regardait, voyait mes blessures et me disait : Tu es un enfant de Dieu. Tu es un frère dans la grande famille de mes enfants. Notre descendance sera grande.
Quand j’ai voulu enfin sortir de l’eau, mon compagnon de route avait disparu. Trop vite à mon goût. Mais en même temps, je savais bien qu’on ne perdait pas le lien, puisqu’on était à partir de ce jour, membres de la même famille.
J’ai continué ma route si joyeusement et soulagé que j’ai chanté tout au long du chemin. Ce jour-là, la porte la plus importante de ma vie s’est ouverte :
celle qui m’avait interdit d’ouvrir la bouche,
celle qui m’avait enfermé en moi-même,
celle qui m’a mis dans une case dans le regard des hommes.
Aujourd’hui cette porte s’était ouverte pour être libre d’être ce que j’étais, l
Libre de laisser habiter la foi en moi, libre d’en rendre témoignage autour de moi.
Ma route était longue, mais je souhaite à tous les autres en route, et en recherche comme moi, de trouver des compagnons de route qui aident à mieux comprendre la Bible, à leur raconter le message de Jésus de Nazareth et les ouvrir à la liberté d’être. Amen
Christina Weinhold, juin 2024