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le culte du 07 juillet 2024 La déclaration de Barmen thèses 3 et 4
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prédication Barmen 3 et 4 corr
Prière d’illumination
Seigneur, tu es le Maître et nous sommes tes disciples;
c’est de toi que nous avons tout à apprendre.
Cependant, nous sommes lents à comprendre
et à croire ce qui concerne ton Royaume.
Mais tu nous as promis ton Esprit de vérité,
pour nous conduire dans toute la vérité.
Ouvre nos cœurs et dispose nos oreilles,
afin que nous recevions, ensemble et maintenant,
la connaissance du salut que tu accordes à l’humanité. Amen.
Lectures bibliques
Mt 20, 20Alors la femme de Zébédée s’approcha de Jésus avec ses deux fils ; elle se prosterna devant lui pour lui faire une demande. 21« Que veux-tu ? » lui dit Jésus. Elle lui répondit : « Ordonne que mes deux fils que voici siègent l’un à ta droite et l’autre à ta gauche quand tu seras roi. » – 22« Vous ne savez pas ce que vous demandez, répondit Jésus. Pouvez-vous boire la coupe de douleur que je vais boire ? » – « Nous le pouvons », lui répondirent-ils. 23« Vous boirez en effet ma coupe, leur dit Jésus. Mais ce n’est pas à moi de décider qui siégera à ma droite et à ma gauche ; ces places sont à ceux pour qui mon Père les a préparées. » 24Quand les dix autres disciples entendirent cela, ils s’indignèrent contre les deux frères. 25Jésus les appela tous et dit : « Vous savez que les chefs des peuples les commandent en maîtres et que les personnes puissantes leur font sentir leur pouvoir. 26Mais cela ne se passera pas ainsi parmi vous. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur, 27et celui qui veut être le premier parmi vous sera votre esclave : 28c’est ainsi que le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie comme rançon pour libérer une multitude de gens. »
Ephésiens 4, 1Je vous le demande donc avec insistance, moi qui suis prisonnier parce que je sers le Seigneur : vous que Dieu a appelés, conduisez-vous d’une façon digne de cet appel. 2Soyez toujours humbles, doux et patients. Supportez-vous les uns les autres avec amour. 3Efforcez-vous de maintenir l’unité que donne l’Esprit saint par la paix qui vous lie les uns aux autres. 4Il y a un seul corps et un seul Esprit, de même qu’il y a une seule espérance à laquelle Dieu vous a appelés. 5Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême ; 6il y a un seul Dieu, le Père de tous, qui règne sur tous, agit par tous et demeure en tous.
7Chacun de nous a reçu un don particulier, l’un de ceux que le Christ accorde de façon généreuse. 8C’est pourquoi il est dit dans l’Écriture :
« Quand il est monté vers les hauteurs,
il a capturé des prisonniers ;
il a fait des dons aux êtres humains. »
9Or, que veut dire « il est monté » ? Cela présuppose qu’il est aussi descendu dans les régions les plus profondes de la terre. 10Celui qui est descendu est aussi celui qui est monté au plus haut des cieux afin de remplir tout l’univers. 11Et c’est lui qui a donné les apôtres, les prophètes, les évangélistes, les pasteurs et les enseignants. 12C’est ainsi qu’il a rendu ceux qui lui appartiennent aptes à accomplir leur service, pour que se construise le corps du Christ. 13De cette façon, nous parviendrons tous ensemble à l’unité de la foi dans la connaissance du Fils de Dieu ; nous prendrons ensemble une stature parfaite d’adultes, à la mesure de la plénitude du Christ. 14Alors, nous ne serons plus des enfants, emportés par les vagues ou le tourbillon de toutes sortes de doctrines, trompés par des personnes qui recourent à la ruse pour entraîner les autres dans l’erreur. 15Au contraire, en proclamant la vérité avec amour, nous grandirons en tout vers celui qui est la tête, le Christ. 16C’est grâce à lui que le corps forme un tout solide, bien uni par toutes les articulations dont il est pourvu. Ainsi, lorsque chaque partie fonctionne comme elle doit, le corps entier grandit et se construit par l’amour et dans l’amour.
Prédication
Depuis dimanche dernier, je vous propose de découvrir un document qui a marqué l’histoire de l’Eglise protestante. Quand on dit « histoire », d’habitude, on pense aux documents qui datent de plusieurs siècles. Or je parle d’un document qui est, sur un plan historique, plutôt jeune : 90 ans, par rapport à l’âge de l’Eglise c’est très peu de chose.
C’est la déclaration de Barmen que vous avez entre les mains.
Barmen, c’est une ville, un quartier de la ville de Wuppertal, ville allemande près de Dusseldorf.
Il y a 90 ans, des représentants de différentes églises allemandes, luthériennes et réformées, se sont rencontrés, car ils avaient un but commun : se positionner contre l’idéologie nazie qui était fraichement élue au pouvoir et qui prenait le dessus matériellement mais aussi spirituellement sur le fonctionnement de l’Eglise.
Leur réunion et déclaration à Barmen était un acte de résistance contre ces prises de pouvoir de l’Etat sur l’Église.
Et dans cet acte de résistance, il fallait se mettre d’accord sur des bases communes de la foi chrétienne et de la compréhension de l’Eglise.
La déclaration exprime sa résistance en
C’est pourquoi le document a rayonné au-delà de son contexte allemand et historique, car c’est devenu un texte fondateur pour se positionner comme croyant face au pouvoir public et politique, notamment quand il est erroné et malsain.
Même si nous ne sommes pas dans le même contexte qu’à l’époque,
il y a toute même des parallèles avec l’actualité de notre société française aujourd’hui :
L’instabilité politique,
Des prises des positions clivantes, idéologiques et violentes,
La recherche de boucs émissaires,
Et la tentation de mettre au pouvoir celles et ceux qui promettent des solutions simples et radicales … comme si le monde était simple.
Du coup, un peu de recul,
Voyons ce qu’ils ont écrit il y a 90 ans.
Les deux premières thèses, nous les avons lues la dernière fois.
Je vous propose de découvrir la suite :
3. « Professons la vérité dans la charité, et croissons à tous égards en celui qui est le chef, Christ, par lequel tout le corps est bien uni. » (Ephésiens 4,15-16)
L’Église chrétienne est la communauté des frères (et soeurs) dans laquelle Jésus-Christ présent agit comme Seigneur, par le Saint-Esprit, dans la Parole et les Sacrements. C’est au milieu même du monde pêcheur que, par sa foi et son obéissance, par son message et par ses institutions, elle doit confesser/ témoigner, Église des pécheurs sauvés par grâce, qu’elle n’appartient qu’à lui seul et qu’elle vit et voudrait vivre uniquement de la force qu’il donne et de ses enseignements dans l’attente de son retour.
Nous rejetons la fausse doctrine selon laquelle l’Église pourrait abandonner le contenu de son message et son organisation à son propre bon plaisir ou aux courants successifs et changeants des convictions idéologiques et politiques.
Cette thèse rappelle ce que veut dire « être église ».
Elle rappelle que c’est avant tout la communauté, la communion de personnes, des frères et des sœurs qui savent et font confiance que Jésus-Christ est présent parmi eux. Des frères et des sœurs humains qui se savent pécheurs et sauvés par la foi. Des gens comme vous et moi. Personne n’est parfait et pourtant ensemble nous essayons de rendre témoignage du Christ.
Pourquoi était-il important de rappeler cela ?
Parce qu’en face, chez les chrétiens dit « allemands », les protestants conformes à l’idéologie nazie, on procédait d’une autre manière. Il y avait ceux du « dedans » et ceux du « dehors », ceux qui avaient le droit d’appartenir et ceux que non. Leur vision du monde était de dire : toute personne qui veut appartenir à l’Eglise doit cocher les cases suivantes pour y accéder.
Qui n’est pas conforme, qui ne prêche pas ce qui est demandé, doit quitter l’Eglise et en subir les conséquences.
C’est à quoi les protestants réunis à Barmen s’opposent.
Ce n’est pas à nous de dire qui est dedans ou dehors. La communion se fait par la présence du Christ parmi nous. Il s’est approché de toute personne sans tenir compte des critères qui auraient pu le repousser.
Il s’approchait des lépreux, à la marge de la société,
des collecteurs d’impôts , détestés pour leur boulot et considérés comme des « collabos »,
il laissait venir à lui les enfants,
il n’avait pas honte d’être vu avec des femmes de mauvaise réputation …
La communauté du Jésus-Christ était inclusive avant même qu’on n’utilise ce mot.
« Chacun de nous a ses défauts », reconnaissent les auteurs de la déclaration, mais ce n’est pas pour cela qu’on n’est pas Eglise, membre de l’Eglise. Pour se mettre à la suite de Jésus, il ne faut pas réussir des concours, ni parcourir un marathon administratif, ni faire preuve de quoi que ce soit, mais il suffit d’être appelé, appelé à le suivre.
Dans cette communion de personnes qui suivent l’appel malgré leurs limites, se manifeste finalement la présence de Dieu dans le monde.
C’est à travers eux que le témoignage du Royaume de Dieu continue, après le départ de Jésus-Christ.
D’où le choix du texte de la lettre aux Ephésiens.
Ephésiens 4, 1Je vous le demande donc avec insistance, moi qui suis prisonnier parce que je sers le Seigneur : vous que Dieu a appelés, conduisez-vous d’une façon digne de cet appel. 2Soyez toujours humbles, doux et patients. Supportez-vous les uns les autres avec amour. 3Efforcez-vous de maintenir l’unité que donne l’Esprit saint par la paix qui vous lie les uns aux autres. 4Il y a un seul corps et un seul Esprit, de même qu’il y a une seule espérance à laquelle Dieu vous a appelés.
Ce n’est pas le fait d’être patient ou paisible qui donne accès à la communauté, mais c’est la communauté et la présence du Christ qui peut aider à y parvenir un peu plus.
Là où le monde réclame des slogans, notamment des slogans d’exclusion,
de garder le calme, de s’entraider, pour se supporter avec patience, en restant paisible, en oeuvrant pour la paix.
Là où le monde autour monte les uns contre les autres,
ne pas se laisser influencer mais chercher à unir.
Là où le monde veut mettre des personnes dans des cases et les classifier,
faire contre-témoignage par un accueil inconditionnel etc etc .
Ce regard sur l’Eglise touche un autre aspect de la foi, celui de l’incarnation.
Dieu devenu homme, Dieu parmi les humains.
C’est en quoi croient les chrétiens,
Et l’Eglise est comprise à sa suite comme la façon dont cette incarnation, Dieu parmi les humains, continue.
« Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je serai parmi eux. » a promis le Christ.
Et vous « serez mes témoins » a-t-il dit.
Rendre témoignage de la présence divine parmi nous, c’est ce à quoi nous sommes appelés. Cela rejoint un peu la première thèse, où déjà était souligné, d’être au service dans la création.
Ici, le rôle de l’Eglise et de la communauté des chrétiens est dit de façon plus spécifique.
Une communauté qui met dans son centre l’accueil inclusif,
Qui se reconnait pécheurs et sauvés par la foi,
De quelle d’autre manière peut-elle rendre témoignage dans le monde que de faire de même ?
Annoncer et agir en sorte que tout le monde y trouve sa place sans regard de la personne.
Contredire en paroles et en actes celles et ceux qui cherchent à diviser et à exclure.
4. « Vous savez que les princes des nations les asservissent et que les grands les tiennent sous leur puissance. Il n’en sera pas ainsi parmi vous ; au contraire, celui qui voudra être grand parmi vous, qu’il soit votre esclave. » (Matthieu 20,25-26)
S’il y a différentes fonctions dans l’Église, aucune d’entre elles ne doit dominer les autres, car toutes doivent concourir à l’exercice du ministère confié à la communauté tout entière.
Nous rejetons la fausse doctrine selon laquelle l’Église pourrait, en dehors de ce ministère, se donner ou se laisser donner un Chef muni de pouvoirs dictatoriaux.
On pourrait intituler cette 4ème thèse : « Donnez vous-mêmes l’exemple ! » ou « commencez par vous-mêmes ! »
Si l’Eglise refuse une dictature au niveau politique, qu’est-elle prête à faire elle-même pour assurer dans ses propres rangs une autre forme de gouvernance de l’Eglise ?
Car oui, les croyants ne sont pas à l’abri de la tentation du pouvoir.
Les disciples en donnent un premier exemple.
N’est-ce pas, cela fait presque sourire cette histoire de l’évangile de Matthieu où la maman de deux disciples de Jésus s’approche devant Jésus avec ses garçons, se prosterne et demande : « Ordonne que mes deux fils que voici siègent l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, quand tu seras roi. » Mt 20, 21
Ah, les mères qui voient en chaque fils un futur médecin, un avocat ou, pourquoi pas, carrément un prince !
La première tentation ici est de penser, que d’être le mieux placé dans le regard des gens,
ce serait aussi le mieux, source de bonheur pour nous et nos enfants.
Jésus contredit vivement cela.
Et dans le même récit se cache une autre tentation, celle de se soumettre à une personne dont on soupçonne qu’elle aurait des pleins pouvoirs.
« Ordonne ! » dit la mère. Elle a une vision comme si Jésus pouvait régner et décider en claquant des doigts.
C’est touchant que cette histoire ait trouvé sa place dans nos évangiles.
Elle joue le rôle d’un grand avertissement contre toute personne qui pense que la religion serait un lieu de pouvoir et où on pouvait faire les même jeux de pouvoir que dans le monde à l’entour.
A ces idées, Jésus met en garde :
22« Vous ne savez pas ce que vous demandez, répondit Jésus. Pouvez-vous boire la coupe de douleur que je vais boire ? »
Et puis il explique et exprime toute son impuissance et que toute sa mission et la mission de celles et ceux qui souhaitent le suivre se résume dans le service des uns envers les autres. Se résume à se baisser et à se mettre au niveau des plus petits, des plus précaires, des plus méprisés pour servir et aider à se relever.
C’est la conséquence logique de ce qui était exprimé dans la thèse auparavant. Une Eglise qui se comprend comme une communauté fraternelle, ne peut se donner aucune autre structure que celle du service réciproque et donc d’une structure à hiérarchie plate.
Suivre le Christ, cela veut dire, comme lui, renoncer au pouvoir individuel, et retrouver la force dans la confiance et dans le soutien réciproque.
Suivre le Christ, être proche de lui n’est pas forcément garantie de bonheur, mais comporte des risques. Le risque de subir comme Jésus les conséquences d’une grande vulnérabilité et fragilité.
Avec sa 4ème thèse, la déclaration de Barmen se reconnaît comme
église petite, minoritaire et vulnérable,
une église à contre courant,
une église en danger face aux menaces du régime nazi qui cherche à les faire taire,
mais une église qui accepte et assume de l’être pour ne pas trahir ses convictions.
Elle proclame sa confiance qu’à la fin il sera toujours plus porteur, de se soutenir les uns les autres en solidarité, que de se mettre dans la course du plus fort et du plus pertinent.
A mon sens c’est là encore un défi pour nous aujourd’hui.
Nous sommes église minoritaire à notre façon aujourd’hui,
Peu connue,
Petite et fragile.
Faisons-nous confiance que Dieu nous porte tout de même dans nos projets ?
Dans un monde où beaucoup courent pour être plus performants encore,
Où nos jeunes sont obligés de faire des concours éliminatoires,
au lieu d’être valorisés pour leurs compétences propres,
Où on sème lors des législatives la peur de l’autre comme une menace,
et non comme un possible aide et soutien,
Un monde,
Où on exclut assez vite celles et ceux qui ne sont pas dans la norme ..
Je pense que nous avons un rôle important à jouer et un message à faire passer :
La grâce de Dieu doit nous suffire pour nous accepter, nous accueillir, et voir comment chacun peut donner sa part pour s’entraider réciproquement.
Et bien sûr nous devons être jugés là-dessus, si nous y arrivons, ici chez nous, dans nos structures de l’Eglise.
La tentation du pouvoir existe toujours, c’est sûr,
Mais je suis plutôt fière de nous, de notre Eglise locale, comme de l’Eglise dans un sens plus large … c’est un endroit où beaucoup se donnent sans se préoccuper de son statut ou de son niveau de formation. Prêter la main pour la braderie, pour les activités de l’Eglise, pour chaque rencontre …
Une dame plutôt âgée me disait une fois que l’Eglise avait fait des progrès là-dessus.
« Dans le temps », disait-elle, « il y a avait des familles, honorables, bourgeoises, c’était clair que c’était elles qui avaient leur mot à dire dans l’Eglise et moi, jeune fille immigrée, je n’osais même pas m’approcher d’elles. Aujourd’hui, dit-elle, ce n’est plus comme çà. Et c’est bien. Tout le monde peut dire ce qu’il ou elle pense et tout le monde peut y trouver sa place. »
Aussi petite soit-elle,
J’ose espérer que nous donnons par notre manière de vivre l’Eglise un témoignage encourageant à la société autour de nous, qu’une vie collective sans peur d’autrui et dans la solidarité réciproque est toujours possible. Amen
Christina Weinhold , 30 juin 2024